Une mosaïque exceptionnelle découverte à Chypre
Comme chaque été les campagnes de fouilles s’avèrent fructueuses, notamment sur l’île de Chypre (voir ici un autre article sur une mosaïque représentant les 12 travaux d’Hercule découverte en juillet 2016).
Une équipe d’archéologues a cette fois-ci mis au jour une mosaïque exceptionnelle à Akaki dans le district de Nicosie (Chypre). Les propections commencèrent dès 2013 : les archéologues avaient alors déjà trouvé une citerne imposante (10 x 14 m), ainsi que des fragments de mosaïques dès 2013. Des campagnes de fouilles sont par ailleurs prévues jusqu’en 2017 dans cet espace.
Le 9 août 2016, les archéologues ont fait une découverte rare. Il s’agit d’une immense mosaïque du IVe s. ap. J.-C. qui montre comme scène centrale une saisissante course de chars, mais aussi des médaillons avec des représentations et un décor géométrique complexes sur les bordures. C’est la seule mosaïque représentant une course de chars découverte sur l’île et la septième de ce type retrouvée dans le monde gréco-romain (selon le directeur des fouilles, Fryni Hadjichristophi). Notons que le musée gallo-romain de Fourvière à Lyon dispose d’un exemplaire exceptionnel (une vidéo ici).
La mosaïque chypriote :
Au-delà de l’aspect esthétique, cette découverte est capitale non seulement pour en savoir davantage sur les propriétaires aisés de cette mosaïque, mais aussi pour enrichir notre connaissance de la colonisation romaine de l’île chypriote.
La mosaïque est d’une grande qualité et de dimensions impressionnantes : large de quatre mètres et longue de vingt-six mètres. Sur la vidéo ci-dessous, la finesse des tesselles est bien visible. Elle dépeint une course de chars dans un cirque (hippodrome dans le monde grec). C’est une course classique avec des auriges qui font généralement sept tours (autour d’une spina délimitée ici par des couleurs vives). Comme au Cirque Maxime à Rome, nous voyons des bornes (metae) qui sont placées à chaque extrêmité de la spina.
Afin de ne pas perdre de temps, les auriges doivent passer le plus près possible de ces bornes, ce qui pouvait se révéler particulièrement dangereux : les chars pouvaient se percuter ou se retourner, l’aurige pouvait percuter la borne… Les artistes ont même su représenter le mouvement, notamment avec les chevaux lancés à pleine vitesse.
La mosaïque montre également les dauphins qui permettaient de compter les tours, comme dans le Cirque Maxime à Rome. Les courses principales dans les hippodromes regroupaient quatre équipages et c’est le cas ici. En outre les auriges portent des vêtements de couleurs différentes et reprenant les factions habituelles (vert, bleu…).
La richesse des détails permet même d’apercevoir les limites du cirque et les gradins. Outre les auriges, deux personnages sont aussi visibles : un homme debout tenant un fouet et un autre qui apporte une coupe.
Un plan du Cirque Maxime (le plus grand cirque du monde romain) permet de mieux comprendre l’architecture de ce type d’édifice de spectacle.
La mosaïque présente également des inscriptions en grec (en lettrage noir) qui nomment les auriges et un des chevaux selon le département des Antiquités.
Les médaillons avec les divinités féminines pourraient représenter les neuf muses, un type classique de représentation.
Cette mosaïque devait vraisemblablement orner le sol d’une villa appartenant à un personnage très riche, peut-être un marchand ou un homme politique local selon les archéologues.
Une vidéo permet de mieux mesurer l’ampleur de la découverte :
Rappelons pour terminer qu’être aurige était certes un métier risqué, mais aussi un métier qui pouvait rapporter énormément d’argent. Au IIe s. ap. J.-C., l’aurige Crescens avait par exemple remporté plus d’un million et demi de sesterces. Or quand on sait que la fortune minimale de l’élite sénatoriale était d’un million de sesterces, cela permet de se rendre compte de la fortune amassée !
Une autre vidéo :
références :
http://abcnews.go.com/International/rare-4th-century-mosaic-floor-unearthed-cyprus/story?id=41266616
http://www.exponaute.com/magazine/2016/08/12/deux-rares-mosaiques-romaines-decouvertes-a-chypre/
Sur les jeux du cirque : http://www.noctes-gallicanae.fr/Circenses/circenses.htm
Une réflexion sur “Une mosaïque exceptionnelle découverte à Chypre”